Daffa Konaté, de Responsable Financière à Art Manager

OH MY FLOW
8 min readAug 14, 2020

‘ Je me suis rendue au Sénégal pour les vacances de fin d’année. C’est en faisant une balade au village artisanal que j’ai eu un déclic. L’atmosphère, les discussions avec les artistes, leurs superbes créations, les voir travailler tous dans un même endroit…tout cela m’a séduit. Je me suis dit que l’art est le moyen de revaloriser l’image de l’Afrique !’

Daffa Konaté organise des événements artistiques et culturels dans des lieux atypiques à Istanbul. A chacune de ses expositions, elle espère créer cette même émotion chez son public en lui faisant découvrir le meilleur de l’art Africain.

Avant d’en arriver là, elle fait carrière dans le contrôle de gestion et la micro-finance. 10 longues années pendant lesquelles, elle a toujours atteint ses objectifs mais ressent un profond ennui, c’est qu’on appelle le ‘bore-out ’. Contre toute attente, c’est lors de l’expatriation de son conjoint en Turquie qu’elle va trouver sa propre voie. Elle réussit enfin à se libérer de cette insatisfaction au travail et met des mots sur le métier qui l’épanouit depuis 4 ans maintenant.

Discrète, Daffa est une femme pleine d’ambition qui réussit le pari de entrepreneuriat à l’étranger.

Pouvez-vous nous parler de votre parcours ?

J’ai grandi en région Parisienne où j’ai obtenu un baccalauréat Economique et Social. Après une année universitaire en faculté d’ Economie , je me suis envolée pour Montréal afin d’obtenir mon Bachelor dans la même spécialité ainsi qu’un certificat en Géographie. C’était quatre belles années universitaires. Quitter mon petit cercle familial m’a ouvert les yeux sur la réalité vie, j’ai beaucoup appris sur le fonctionnement de l’être humain.

Par la suite, je suis retournée en France pour poursuivre un DEA et j’ai commencé à travailler pour une association qui accompagne les migrants Africains à concrétiser leurs projets dans leurs pays d’origine. C’était exactement ce que je voulais faire : travailler au sein d’une association ou d’une ONG engagée pour le développement de l’Afrique.

Toutefois, je suis contrainte de mettre fin à cette première expérience professionnelle. Je démissionne au bout de 2 ans pour cause d’harcèlement sexuel et moral et je me retrouve au chômage pendant une année entière. Mon moral est tombé très bas. Mes parents, face à ce constat, m’ont encouragé à prendre des vacances à Dakar pour me changer les idées et j’ai fini par y rester 4 ans !

Une fois dans la capitale Sénégalaise, j’ai trouvé un emploi au sein d’un programme de micro-finance financé par la Banque Mondiale. J’aimais beaucoup aimé évoluer au sein d’une équipe à taille humaine, nous étions 5 collaborateurs très unis. Par contre, le travail était en dessous de mes compétences et puis je me suis vite rendue compte que cela ne me passionnait pas vraiment.

En 2007, je me marie, je rentre à Paris et intègre un programme financé par les Ministère de la Santé et des Affaires Etrangères. Pendant 7 ans, je ferai du contrôle de gestion avec la rigueur naturelle qui me caractérise et je réussis à atteindre les objectifs qui me sont fixés. Je rencontrerai de belles personnes qui sont d’ailleurs toujours présentes dans ma vie. Mais une fois de plus, c’est le même constat : ce travail ne me passionne pas.

Et puis mon mari a eu une opportunité de travail en Turquie. Après avoir hésité, j’ai pris une grande décision. J’ai démissionné et je l’ai suivi. J’avoue que ce n’était pas facile parce que j’ai toujours voulu travailler pour être une femme indépendante et c’est ce que j’avais toujours fait jusque-là.

Une fois à l’étranger, comment avez-vous trouvé votre voie ?

Quand nous sommes arrivés en mi-août c’était encore les vacances, puis les enfants ont vite repris le chemin de l’école et je me suis retrouvée seule à la maison.

Je ressentais vraiment l’envie de m’investir dans un travail épanouissant mais j’étais dans le plus grand flou, alors j’ai alors décidé de m’inscrire à un programme de coaching.

En décembre 2015, j’avais déjà quelques pistes sur mon projet. Je savais que c’était autour l’Afrique, forcément. C’est ce que j’ai toujours voulu faire. Cette fois-ci, j’étais décidée à montrer une facette différente du continent, je voulais sortir des stéréotypes et des clichés. Même si je ne savais toujours pas précisément ce que je voulais mettre en évidence.

Et puis comme chaque année, je me suis rendue au Sénégal pour les vacances de fin d’année. C’est au village artisanal que j’ai eu un déclic.

L’atmosphère, les discussions avec les artistes, leurs créations, les voir travailler tous dans un même endroit… tout cela m’a séduit. Je me suis dit que l’art et la culture étaient le meilleur moyen de revaloriser l’image de l’Afrique !

J’ai expliqué aux artistes ce que je voulais faire et 3 semaines plus tard, je rentrais à Istanbul avec de magnifiques toiles à exposer ! Ces artistes je ne les connaissais pas, et à ma grande surprise, ils m’ont accordé toute leur confiance en me prêtant leurs toiles. Cette générosité m’a énormément motivé pour la suite de mon projet.

Ces vacances avaient été –plus- que bénéfiques : j’avais balisé mon projet, je savais exactement je voulais aller et je savais comment m’y prendre. En parallèle du programme de coaching que je suivais, je me suis intéressée à cette époque au développement personnel. Les podcasts, les livres, les vidéos ont énormément alimenté ma réflexion.

Comment avez-vous trouvé vos premiers clients ?

J’ai organisé une vente privée en décembre 2016 avec les œuvres fraîchement ramenées de mon voyage à Dakar, ce premier événement a eu un franc succès. Grâce à mon cercle d’expatriés, notamment par le biais d’ une association internationale femmes à Istanbul, j’ai pu toucher ma cible et plusieurs personnes ont répondu positivement à mon invitation.

Vous savez, il y a beaucoup de curiosités et d’idées préconçues sur l’art Africain ! On le réduit la plupart du temps aux masques ou aux sculptures et c’est précisément ce qui rend mon travail si intéressant.

Je fais découvrir l’art contemporain qui est très peu connu et j’espère créer chez le public une émotion et véhiculer une image positive de l’Afrique.

D’ailleurs, cette année, j’ai commencé à organiser des ateliers et des conférences auprès de jeunes dans un lycée franco-truc pour les initier à l’art et à la culture Africaine. Ça me paraît important de le faire cette éducation artistique et culturelle dès le plus jeûne âge.

Avez-vous eu des blocages au moment de vous lancer ?

Le fait d’être dans un nouveau pays et de ne pas parler la langue turque a été un blocage, c’est sûr. Pour tout vous dire, certaines personnes de mon entourage se disaient que c’était juste un passe-temps tellement cela paraissait improbable.

Mais j’étais décidée. A mes débuts, je me suis uniquement focalisée sur des toiles de peinture mais je me suis vite rendue compte que ce business model n’était pas viable. J’ai donc élargi ma gamme de produits et proposé une sélection de bijoux, d’articles d’artisanat de sacs et de vêtements. C’est ainsi que je me suis créée une clientèle de plus en plus fidèle à Istanbul où j’ai organisé plusieurs expositions. Les villes de Paris, Dakar et Nairobi ont également accueilli à plusieurs reprises les événements Kelen.

Je tiens toujours à les organiser dans de belles galeries, mais aussi des endroits atypiques que sont les restaurants ou encore les hôtels. Dans ces lieux uniques que je choisi méticuleusement, je veux toucher la sensibilité de personnes curieuses, ouvertes à l’idée de découvrir une autre Afrique : riche, créative et inventive.

Avez-vous l’impression que vos compétences sont pleinement utilisées à présent ?

Oui ! Au quotidien, je m’occupe de toute la conceptualisation des expositions de A à Z. Je définis le thème de l’événement, choisis les œuvres et les produits à exposer, fais la scénographie c’est-à-dire l’agencement et la mise en scène des œuvres, négocie avec les artistes donc je fais également leur promotion sur le site Kelen. Mon activité exige que je sois multitâche. J’apprends énormément et je relève les défis qui se dressent devant moi comme je ne l’ai jamais fait.

Non seulement j’ai le sentiment que mes capacités sont pleinement utilisées, mais je sais prendre des initiatives. Avant je ne me lançais pas, mais à présent je le fais aisément car ce projet me porte complètement. Peut-être un peu trop parfois, il m’arrive de ne pas compter les heures, rires.

Qu’est-ce qui vous plaît dans l’entrepreneuriat ?

Comparée à mon expérience de salariée, je me rends compte que quand on s’investit dans un projet qui nous porte, notre énergie est décuplée. Dans mon métier, il faut se tenir au courant des artistes émergents, des tendances qui vont paraître, élaborer des projets d’expositions originales, les mettre en résonance avec un beau lieu et j’aime ça.

Je suis tout le temps en train de réfléchir à ce que je dois faire, comment je dois le faire, quand je dois le faire, je suis constamment dans Kelen.

Ça m’a permis de prendre confiance en moi. J’ai accompli beaucoup de choses qui ont eu un impact positif autour de moi et ça, je n’aurai pas pu le dire il y a 4 ans.

Quelle est la plus grosse difficulté que vous avez rencontrée ?

En fait, je n’ai pas l’impression jusqu’à présent d’avoir un véritable esprit commercial ou d’avoir un modèle économique abouti. Je pense que j’ai toujours un petit blocage par rapport au fait de demander de l’argent. Peut-être parce que je ne me sens pas légitime.

Une difficulté de taille est la logistique ! C’est une partie stressante de mon travail. J’ai tout de même la chance d’avoir une grande famille qui voyage beaucoup et mon mari qui me ramène des créations assez souvent, mais j’ai toujours une inquiétude par rapport au respect du timing. Les créations viennent principalement du Sénégal, du Mali, du Kenya, d’Afrique du sud et cela demande une solide organisation en amont pour assurer la sécurité du voyage et le bon déroulement des expositions.

Quel serait votre conseil à une femme qui veut se lancer dans l’entrepreneuriat ?

Je lui dirais d’y aller, de se lancer ! L’entrepreneuriat une formidable façon de se découvrir et de se rendre compte de ses réelles capacités. Souvent, on se met dans des cases et on se complaît dans sa zone de confort.

Ensuite, mon autre conseil c’est de se faire accompagner. Comme je vous le disais, j’avais déjà fait un premier accompagnement en coaching à mes débuts, j’en ai également sollicité un second en janvier 2019, à un moment où je me sentais un peu paralysée dans mon business. S’il y a bien une chose que j’ai apprise ces dernières années, c’est qu’il est important de se faire accompagner à chaque étape de sa vie d’entrepreneuse au fur et à mesure que notre activité grandit.

Enfin, je dirai qu’en tant que femme, il faut se bouger, travailler, se réaliser. J’ai une fille et je veux lui montrer que c’est essentiel d’avoir quelque chose pour soi-même. Je veux être cet exemple pour elle et pour moi c’est une excellente raison pour une femme d’oser entreprendre.

Que retenir du parcours de Daffa ?

-Etre fidèle à sa vérité : Nous avons toutes une vérité à exprimer, une cause qui nous tient à cœur, et nous avons notre manière personnelle de le faire.

-Avoir conscience de ses peurs pour pouvoir les dépasser : La première chose à faire quand on veut changer de voie, c’est de faire l’état des lieux de ses doutes et de ses peurs face à ce grand changement. C’est primordial d’identifier ce qui nous bloque le plus pour pouvoir avancer.

-Faites-vous accompagner, c’est essentiel pour définir un projet professionnel concret et clair.

-Le bore-out est un signal d’alerte qu’il faut agir et qu’il est temps de vous réinventer professionnellement, ces centres d’intérêts enfouis au plus profond de vous n’attendent que d’être découverts.

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